Diallo Lancina est le chef des dozos d’Abengourou. Il parle dans
cet entretien de cette confrérie et porte un regard sur le comportement
de certains membres.
Notre Voie : Comment la confrérie dozo est-elle organisée ?
Diallo Lancina : Avant 2002, il n’avait pas
d’association formelle dans notre milieu. Chaque localité avait son
groupe. Mais lorsque les dozos ont été reconnus officiellement, certains
groupements ont déposé leurs dossiers dans les préfectures afin d’avoir
leurs récépissés. C’est ce qui a été fait à Abengourou. Ensuite, nous
avons adhéré à la confrérie des dozos de Côte d’Ivoire (CODOCI).
Après, toutes les confréries ont adhéré à la fédération nationale des
confréries des dozos de Côte d’Ivoire (FENACODOCI). Moi, je suis le
chef des dozos d’Abengourou. Le chef dozo n’est pas un poste électif ou
nominatif. Il est purement spirituel. Seuls ceux qui sont dans le bois
sacré en connaissent les critères. Le fétiche commun de tous les dozos
est le Dankoun.
N.V. : Depuis combien de temps êtes-vous chef dozo d’Abengourou ?
D.L. : Je suis dozo de naissance de par mon père. A un certain
âge, il m’a fait partir au Mali, notre pays d’origine, pour être initié.
Dès mon retour, je suis allé à Duékoué. Ensuite, je suis venu à
Abengourou au temps où Henri Konan Bédié était au pouvoir. Je suis le
premier dozo d’Abengourou.
N.V. : Votre confrérie communale compte combien de dozos ?
D.L. : La confrérie que je dirige a 20 apprenants. C'est-à-dire
ceux qui font l’initiation parce que le dozo détient un certain pouvoir
mystique. Sinon, j’ai plus de 200 éléments.
N.V. : Recevez-vous des soutiens financiers des pouvoirs publics ?
D.L. : Certains disent que nous sommes payés par mois par le
pouvoir Alassane Ouattara. Je m’inscris en faux. En tout cas, à ma
connaissance, nous n’avons jamais reçu un centime d’un pouvoir
politique. C’est moi-même qui m’occupe de mes apprenants.
N.V. : Quel est le rôle exact d’un dozo dans une société?
D.L. : Le rôle premier des dozos, c’est de sauver les vies
humaines. Par exemple, désenvoûter une personne, aider celui qui est
dans des difficultés, guérir les malades. Le dozo est un
tradi-praticien. En réalité, il n’a pas sa place en ville, mais en
milieu rural. Moi, j’étais en campagne. C’est avec l’évolution de la
société que je suis revenu ici pour aider les gens malades. Le dozo ne
fait pas de mal.
N.V. : Vous affirmez que le dozo ne
fait pas de mal. Pourtant, durant la crise, certains ont commis des
atrocités. Comment expliquez-vous cela ?
D.L. : Je vous le dis, un vrai dozo ne peut pas faire du mal à
quelqu’un. Renseignez-vous bien. Le dozo est l’homme qui respecte son
prochain et respecte la vie humaine. Je vais vous éclairer un peu. Les
vrais habits des dozos ne se vendent pas n’importe où. Malheureusement,
les habits confectionnés dans le Nord de la Côte d’Ivoire font office
d’habits de dozo. Quand vous voyez des gens dans cet accoutrement, on
dirait des vrais dozos.
Ce sont eux qui commettent des bêtises partout dans les villages,
campements et hameaux Officiellement, je n’ai pas encore été saisi qu’un
dozo a volé, tué ou commis des exactions à Abengourou. Nous avons nos
sanctions propres. Car en prêtant serment devant le fétiche, l’initié
prend l’engagement de ne pas tuer quelqu’un. Alors, si tu violes cette
règle, tu assumeras les conséquences.
SOURCE :lebabi
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