Fatou Bensouda l'a promis maintes fois : les enquêtes menées
par le bureau de la procureure de la Cour pénale internationale (CPI) en
Côte d'Ivoire viseront les deux camps. Alors que les procès de Simone
Gbagbo, Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé sont en cours, les
investigations se poursuivent dans le pays, pour situer les
responsabilités de personnalités, du camp de l'actuel président
ivoirien.
Par Camille Dubruelh
« Les
enquêtes approfondies de l’affaire CIV II (« forces pro-Ouattara ») ont
commencé en 2016 après avoir pris un retard important, en raison des
limites pesant sur les ressources. » C'est ce qu'indique la Cour
pénale internationale dans son budget programme 2017. Son objectif :
obtenir des fonds supplémentaires pour intensifier ses investigations
l'an prochain, et ce « dans différentes régions de la Côte d’Ivoire ».
Alors
où en sont les enquêtes contre les responsables de crimes commis par
l'autre camp ? Pour des raisons de confidentialité, le bureau de la
procureure ne donne que peu d'informations sur le sujet. Impossible pour
le moment de savoir combien de temps il faudra encore attendre avant la
délivrance d'éventuels mandats d'arrêts par la CPI. « Les enquêtes concernant les crimes relevant des compétences de la Cour sont de nature très complexes »,
justifie Dahirou Sant-Anna, conseiller en coopération internationale
auprès du bureau de la procureure, en charge du dossier CIV 2, pour qui
il est « impossible de parler d'un calendrier ». Une seule affirmation : « Nous sommes déterminés à faire notre travail, suivant nos standards. »
« L'ensemble des incidents » couverts par le bureau de la procureure
Mandaté
depuis 2011 pour enquêter sur la crise post-électorale, le bureau de la
procureure a reçu en 2012 l'autorisation des juges d'étendre ses
investigations aux crimes commis entre le 19 septembre 2002 et le 28
novembre 2010. « Nous procédons par étapes, nous essaierons
d'élargir au fur et à mesure que nous poursuivons nos activités
d'enquête. Pour l'instant, nous sommes concentrés sur la période de la
crise postélectorale. L'objectif est de collecter des preuves de façon
indépendante, impartiale et objective », explique Dahirou Sant-Anna.
Le bureau de la procureure évite par contre d'en dire plus sur les évènements et zones concernés par ses travaux. « Nous
travaillons dans le cadre de la situation en Côte d'Ivoire de façon
générale et couvrons l'ensemble des incidents relevant de la compétence
de la Cour », se limite-t-il à dire.
Les crimes commis dans
l'Ouest du pays sont-ils particulièrement scrutés à la loupe ? Un indice
fourni par le projet de budget 2017 : « Une présence continue à
Abidjan et une nouvelle antenne dans l’ouest de la Côte d’Ivoire seront
nécessaires au Greffe pour apporter un appui aux activités judiciaires
et d’enquête du bureau du procureur, de même qu’un appui linguistique
dans deux langues de situation, qu’un soutien aux témoins et que la
protection des témoins. » Cette question de l'ouverture d'un bureau
concerne le Greffe, assure de son côté le bureau de la procureure,
refusant de préciser si les investigations concernent effectivement
cette région.
« Pas de marchandage »
Quant à connaître les personnalités visées par les enquêtes du bureau de la procureure, on en est encore loin. « La
procureure est très claire. Elle a mentionné qu'il y a une affaire en
cours et qu'il y en aura d'autres, poursuit le conseiller. Les éléments
de preuve sont analysés de façon rigoureuse et à l'issue de cet exercice
juridique, il nous sera possible de déterminer quelles sont les
conséquences, y compris l'émission d'autres mandats d'arrêt par exemple.
Seule la preuve peut nous guider vers des individus. »
Viser
des individus potentiellement proches du pouvoir peut s'avérer délicat
et la coopération avec les autorités ivoiriennes est cruciale pour le
bureau de la procureure. « Pour l'instant, nous n'avons aucun problème particulier à signaler dans le cadre de cette coopération-là »,
assure Dahirou Sant-Anna. Selon le bureau de la procureure, aucune
contrepartie n'a été fournie aux autorités. Pas question par exemple,
d'offrir des garanties de ne pas toucher certaines personnalités. « Nous travaillons de façon indépendante. La justice pénale n'est pas une question de marchandage », soutient le conseiller.
Une lenteur qui nuit à la réputation de la CPI
Que dire alors des récentes déclarations d'Alassane Ouattara selon lesquelles il n'enverra « plus d'Ivoiriens à la CPI » ? « Il faut demander aux autorités ivoiriennes ce que cela sous-entend », réplique le conseilleur du bureau de la procureure. « La
Côte d'Ivoire est un État partie au statut de Rome et a une obligation
générale de coopérer avec la Cour, y compris avec les activités du
bureau du Procureur. Pour l'instant, nous continuons de communiquer avec
les autorités ivoiriennes compétentes », insiste-t-il.
Pour justifier sa position, le président ivoirien, promettant une « justice égale pour tous », avait affirmé que le pays disposait désormais des structures adéquates pour juger les ressortissants ivoiriens. « Si
les autorités ivoiriennes décident de faire des poursuites, cela leur
appartient. Il pourrait se produire que nous soyons en concurrence sur
des dossiers avec elles. À ce moment-là, nous trancherons la question.
Si les autorités ivoiriennes font leur travail, il n'appartient plus à
la procureure d'intervenir. Si ce n'est pas le cas, le bureau du
procureur a toujours un mandat. L'intérêt est d'être complémentaire », affirme Dahirou Sant-Anna.
Lenteur des procédures, accusation d'iniquité, le dossier ivoirien donne en tout cas du fil à retordre à la CPI. « Le
retard pris par l’ouverture de l’enquête de l’affaire CIV II a
fortement nui à la réputation de la Cour qui a été injustement perçu
comme partial dans ses enquêtes », a dénoncé la CPI dans son projet de budget. « Il
faut faire une distinction entre ce qui peut se faire au niveau
national et international. La façon de procéder est plus complexe au
niveau international, justifie Dahirou Sant-Anna, on oublie
souvent que la CPI n'a pas de force de police et compte donc sur la
coopération des États, un principe de base du Statut de Rome. »
SOURCE : IVOIREJUSTICE.NET

il n'aura rien de l'autre cote c'est la justice des vainqueurs quand ils ne seront plus au pouvoirs ils seront juges voila et c'est comme ça
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